La puissance admissible d’un Haut Parleur ou d’une enceinte (ainsi que son ampli associé) fait souvent controverse. Chacun y va des ses propres arguments, plus ou moins contradictoires, et au final, l’utilisateur aura du mal à déterminer la puissance qu’il peut réellement envoyer dans ses HP.
Motifs et raisons:
On pourrait penser qu’un HP donné pour 1000 watts AES va pouvoir encaisser 1000 watts venus d’un ampli, mais ça n’est pas forcément le cas. La puissance maxi d’un HP est mesurée dans des conditions qui lui sont plutôt favorables (charge HP qui peut être totalement ouverte et donc favorable à l’évacuation de la chaleur, mesure dans un milieu tempéré, seulement deux heures de test, tension de référence basée sur Zmin, etc), certains paramètres peuvent remettre en cause cette puissance admissible. Parmi ceux ci:
- la nature du signal musical: la musique enregistrée (disques/MP3) est le plus souvent très compressée et présente un niveau apparent RMS bien supérieur à celui de la musique Live (pour un niveau crête équivalent).
- La charge du caisson: un HP dans une charge close chauffera + que dans une charge Bass reflex ou ventilée (Scoop, Tapped Horn, etc).
- Le X-max: Un HP a une excursion de membrane limitée à son paramètres X-Max. Au delà de cette valeur, le HP va rentrer en distorsion. Et si la puissance augmente, une fois l’excursion maxi dépassée, le HP risque une destruction mécanique de l’équipage mobile par élongations et talonnages excessifs.
L’’utilisateur peut donc être amené à revoir la puissance à la baisse. Exemple avec le WSX Martin, équipé d’un RCF LF18P300 donné pour 1000 watts AES, un caisson qui est pourtant vendu comme acceptant une puissance de 600 Watts AES, certainement à cause de sa charge close et des très fortes pressions internes sur la membrane. A noter que la température ambiante peut aussi avoir son importance et réduira encore un peu plus la puissance admissible.
Les normes existantes:
Norme AES2 (1984):
Le test se fait sur une période de 2 heures avec un signal test de bruit rose présentant un facteur de crête de 6dB, et filtré en 12dB/oct Butterworth sur une décade (exemple 50/500Hz, 200Hz/2000Hz), libre au constructeur de choisir la fréquence de filtrage. Le HP est à l’air libre et sa membrane doit se déplacer dans un mouvement horizontal. A l’issue du test et d’une période de repos, le HP ne doit pas présenter de signes de changement permanents d’un point de vue acoustique, mécanique ou électrique, et ce dans un facteur de tolérance de 10%.
Les auteurs de la norme reconnaissent eux même que ce test n'est pas représentatif des conditions réelles, mais que néanmoins, cela permet une comparaison objective entre HP de différentes marques (ce qui est vrai). Ajoutons aux restrictions de cette norme, les 2 heures de durée de test, trop court pour simuler de vraies conditions, ou encore un signal de test pas assez proche de la teneur d’un signal musical : un signal musical filtré sur une bande de fréquences réduite sollicitera d’avantage l'excursion du haut parleur (ex: voie sub).
Norme EIA RS-426-A (1980):
La période de test dure 8 heures, avec un signal bruit rose facteur de crête de 6dB.
Norme EIA RS-426-B (1998):
C’est une révision de la norme EIA RS-426-A qui prend aussi en compte la compression thermique, la distorsion. On retrouve le test initial avec 8 heures en bruit rose filtré, + un autre test avec un sinus en fréquence glissante rapide (sine sweep) de 40Hz à 10Khz en boucle + d’autres paramètres qui rendent ce test assez complexe. L’industrie audio a majoritairement choisie de ne pas reconnaître ce test.
Norme IEC268-1 (1985):
C’est la norme la plus contraignante. Le test dure 100 heures, signal de test bruit rose avec facteur de crête de 6dB.
Norme RMS:
RMS (Root Mean Square) n’est pas une norme, mais la valeur efficace mesurée d’une tension ou d’un courant. On peut donc imaginer qu’avant la norme AES, les constructeurs de HP avaient des procédures de tests assez hétéroclites, puisque non régies par une norme.
Les constructeurs ont fini par trancher et se mettre tous d'accord: c’est la norme AES qui a été adoptée comme standard de l’industrie audio. Évidemment, la norme AES est plutôt avantageuse par rapport à la norme IEC268-1, et on comprendra aisément que les constructeurs aient choisi la norme la plus valorisante pour leurs HP.
NB: Afin de stopper les idées reçues, et couramment répandues sur le net: les watts mesurés par les normes EIA, IEC ET AES sont bien des watts RMS, chacune de ces mesures encadrée par sa norme. D’autre part, ne cherchez pas à comparer des watts RMS d’amplis et des watts AES/RMS mesurés sur des HP. Les mesures sont faites avec des signaux différents: avec un sinus d’un facteur crête de 3dB pour les amplis, avec un bruit rose facteur crête de 6dB pour les HP. Si un ampli est mesuré à 1000 watts RMS, sa puissance crête sera donc de 2000 watts (+3dB), et si un HP est mesuré 1000 watts AES, sa puissance crête sera de 4000 watts (+6dB). Si on applique à l’ampli de 1000 watts RMS un signal facteur crête de 6dB, sa puissance crête sera toujours de 2000 watts, mais sa puissance RMS avant écrêtage ne sera plus que de 500 watts. D’autres infos sur les rapports RMS/crête ici.
A propos des puissances des HP:
- La Puissance dite « nominale » ou puissance en « régime continu » correspond à la puissance AES.
- la puissances dite « programme » donnée par les constructeurs correspond au double la puissance nominale, soit +3dB.
- la puissance dite « crête » ou « Peak » correspond à la puissance nominale multipliée par 4 soit +6dB.
A propos du niveau SPL des enceintes:
- le niveau SPL dit « continu » ou « nominal » correspond au niveau continu à la puissance admissible nominale.
- le niveau SPL dit « programme » correspond au niveau SPL à la puissance programme, soit +3dB par rapport au niveau continu.
- le niveau SPL dit « max » ou « peak » ou encore « crête » correspond au niveau à la puissance crête, soit +6dB par rapport à la puissance continue.
A noter que ces niveaux ne sont le plus souvent que des calculs théoriques, et ne tiennent pas compte de la compression thermique qui peut abaisser la sensibilité de l’enceinte de 2 ou 3 dB, voire + pour des HP de moindre qualité. Certains constructeurs d’enceintes n’indiquent que le niveau SPL Max, soit +6dB par rapport au niveau théorique calculé en continu. Ainsi une enceinte donnée pour 130dB « Max » ne fera que 124 dB de niveau continu à la puissance nominale. Ne vous laissez donc plus berner par certains chiffres flatteurs et loin de la réalité.
La nature du signal:
Le signal a une part importante sur la tenue en puissance du Haut Parleur. Un signal musical est composé de formes d’ondes complexes qui inévitablement engendrent des crêtes lorsqu’elles sont mixées entre elles. Ces crêtes sont rabotées par les studios de mastering, ce qui augmente le niveau apparent sans pour autant changer le niveau crête qui est fixé à 0dB FS (Full Scale) en numérique. Mais le niveau que nous percevons réellement, est lié au niveau moyen RMS (et non au niveau crête). On distingue donc 2 types de niveaux:
- le niveau crête qui est le niveau absolu maximal atteint par les crêtes (celui mesuré en dB FS par tout appareil numérique ou le clip d’un ampli)
- le niveau RMS qui est le niveau moyen du signal (ou aussi niveau apparent)
Afin de comprendre l’importance du niveau RMS, voici quelques exemples d’extraits audio pour diverses valeurs RMS mais à un même niveau crête de 0dB FS: (Attention, baissez le volume pour écouter les signaux à 100Hz qui sont bien plus forts et pourraient endommager vos enceintes.)